Taxe carbone aux frontières

Taxe carbone aux frontières

Point de départ :

 

Depuis 2005, l’UE s’applique à réduire les émissions de gaz à effet de serre de ses installations industrielles au moyen du système d’échange des quotas d’émissions (SEQE EU).

Mis en place par la directive européenne n°2003/87/CE du 13 octobre 2003, le système SEQE UE consiste à recenser les installations émettrices de CO² et à leur attribuer annuellement des quotas d’émissions gratuits.

Le nombre des quotas gratuits diminue au fil des ans pour totalement disparaitre d’ici 2030.

La perspective de disparition progressive des quotas gratuits a pour effet d’inciter les installations émettrices de gaz à effet de serre à investir dans des outils de production à faibles émissions / de captation de carbone, de sorte à ne plus dépendre des quotas.

Les « bons élèves » se retrouvent avec des quotas non utilisés qu’ils revendent sur le marché. Les « mauvais élèves » se retrouvent, quant à eux, en déficit de quotas et sont obligés de les acheter à des prix de plus en plus élevés. Certains d’entre eux sont tentés de délocaliser leur production dans des pays « moins regardants » pour ensuite importer les produits finis dans l’UE sans subir les contraintes du SEQE UE. C’est pour lutter contre ce phénomène de « fuite de carbone », mais aussi pour protéger l’investissement des industriels européens ayant joué le jeu du SEQE UE, que le système entre dans sa nouvelle phase de déploiement consistant à contrôler non plus seulement la performance des installations industrielles européennes mais aussi celle des installations étrangères qui exportent leurs produits vers l’UE.

 

 

MACF et son fonctionnement :

 

Tel un droit anti-dumping, le mécanisme d’ajustement de carbone aux frontières (MACF) aura pour objet de faire payer aux produits originaires des pays tiers le même effort de décarbonation que celui supporté par l’industrie européenne. Seront exemptés du MACF uniquement les produits originaires des pays ayant les mêmes ambitions environnementales que l’UE, comme les pays d’AELE (Islande, Liechtenstein et Norvège). D’autres pays seront, à terme, inclus sur la liste des pays performants dont les exportations seront exemptées du MACF ou paieront un prix d’ajustement réduit (accords de partenariats bilatéraux à conclure, similaires à ceux pratiqués en matière de lutte contre la déforestation – voir le règlement UE n°2173/2005 FLEGT).

 

Pour l’instant, seuls quelques produits issus des industries le plus polluantes et les plus exposées au risque de fuite de carbone sont concernés (électricité, ciment, engrais, fer, acier, aluminium, hydrogène, certains précurseurs et certains produits dérivés fabriqués à base de produits précités). Mais à terme tous les produits issus des secteurs d’activités soumis au SEQE UE seront intégrés dans le dispositif (calendrier d’intégration progressif à fixer par la Commission par voie d’acte délégué).

 

Les produits concernés par le MACF ne pourront plus être importés dans l’UE autrement que par des importateurs agréés, répondant aux conditions d’honorabilité proches de ceux exigés des OEA, et disposant des capacités techniques et financières suffisantes pour garantir la parfaite exécution des obligations mises à leur charge par le dispositif (calcul et déclaration des émissions, garantie de restitution des certificats MACF à la fin de la période annuelle).

 

Les importateurs agréés devront déclarer chaque année le volume des produits concernés par le dispositif mis en libre pratique sur le territoire douanier de l’UE (ou placés sous le régime de perfectionnement actif pour servir de matières premières à la fabrication des produits dérivés qui seront par la suite mis en libre pratique dans l’UE). Ils devront également calculer et déclarer les émissions de gaz à effet de serre générées par le processus de fabrication de ces produits (et, plus tard, aussi de leur transport jusqu’à l’UE). Les importateurs agréés restitueront ensuite, avant le 31 mai de l’année N+1, le nombre de certificats MACF nécessaires pour compenser ces émissions (certificats à acheter au préalable auprès de l’Autorité MACF, à constituer).

 

Les déclarations faites par les importateurs agréés seront certifiées par des vérificateurs accrédités. Les installations de fabrication étrangères jugées fiables pourront bénéficier du statut d’installations enregistrées, les dispensant d’une partie des vérifications.

 

Le prix des certificats sera, dans un premier temps, calculé en fonction du prix moyen hebdomadaire de vente aux enchères des quotas du SEQE UE, exprimé en EUR/tonne de CO² émis. Le mécanisme de calcul du prix des certificats évoluera par la suite ensemble avec l’évolution du SEQE UE, l’attribution des quotas gratuits ayant vocation à disparaitre.

 

Les ressources financières générées par le MACF auront le statut de ressources propres de l’UE, mais serviront également à financer la participation de l’UE à l’effort de décarbonation fait par les pays en voie de développement.

 

Le contrôle de l’application du MACF sera confié aux autorités douanières des États membres, qui agiront de concert avec l’Autorité MACF.

 

 

Calendrier d’entrée en vigueur du MACF :

 

Le MACF entrera en vigueur de manière progressive. Les importateurs agréés devront déclarer la quantité des émissions générées par les produits importés dès le 1er octobre 2023. Ils ne devront les compenser par des certificats MACF à acheter qu’à partir de 2026 ou 2027.

MACF: comprendre l’essentiel

MACF: comprendre l’essentiel

Point de départ :

 

Depuis 2005, l’UE s’applique à réduire les émissions de gaz à effet de serre de ses installations industrielles au moyen du système d’échange des quotas d’émissions (SEQE EU).

Mis en place par la directive européenne n°2003/87/CE du 13 octobre 2003, le système SEQE UE consiste à recenser les installations émettrices de CO² et à leur attribuer annuellement des quotas d’émissions gratuits.

Le nombre des quotas gratuits diminue au fil des ans pour totalement disparaitre d’ici 2030.

La perspective de disparition progressive des quotas gratuits a pour effet d’inciter les installations émettrices de gaz à effet de serre à investir dans des outils de production à faibles émissions / de captation de carbone, de sorte à ne plus dépendre des quotas.

Les « bons élèves » se retrouvent avec des quotas non utilisés qu’ils revendent sur le marché. Les « mauvais élèves » se retrouvent, quant à eux, en déficit de quotas et sont obligés de les acheter à des prix de plus en plus élevés. Certains d’entre eux sont tentés de délocaliser leur production dans des pays « moins regardants » pour ensuite importer les produits finis dans l’UE sans subir les contraintes du SEQE UE. C’est pour lutter contre ce phénomène de « fuite de carbone », mais aussi pour protéger l’investissement des industriels européens ayant joué le jeu du SEQE UE, que le système entre dans sa nouvelle phase de déploiement consistant à contrôler non plus seulement la performance des installations industrielles européennes mais aussi celle des installations étrangères qui exportent leurs produits vers l’UE.

 

 

MACF et son fonctionnement :

 

Tel un droit anti-dumping, le mécanisme d’ajustement de carbone aux frontières (MACF) aura pour objet de faire payer aux produits originaires des pays tiers le même effort de décarbonation que celui supporté par l’industrie européenne. Seront exemptés du MACF uniquement les produits originaires des pays ayant les mêmes ambitions environnementales que l’UE, comme les pays d’AELE (Islande, Liechtenstein et Norvège). D’autres pays seront, à terme, inclus sur la liste des pays performants dont les exportations seront exemptées du MACF ou paieront un prix d’ajustement réduit (accords de partenariats bilatéraux à conclure, similaires à ceux pratiqués en matière de lutte contre la déforestation – voir le règlement UE n°2173/2005 FLEGT).

 

Pour l’instant, seuls quelques produits issus des industries le plus polluantes et les plus exposées au risque de fuite de carbone sont concernés (électricité, ciment, engrais, fer, acier, aluminium, hydrogène, certains précurseurs et certains produits dérivés fabriqués à base de produits précités). Mais à terme tous les produits issus des secteurs d’activités soumis au SEQE UE seront intégrés dans le dispositif (calendrier d’intégration progressif à fixer par la Commission par voie d’acte délégué).

 

Les produits concernés par le MACF ne pourront plus être importés dans l’UE autrement que par des importateurs agréés, répondant aux conditions d’honorabilité proches de ceux exigés des OEA, et disposant des capacités techniques et financières suffisantes pour garantir la parfaite exécution des obligations mises à leur charge par le dispositif (calcul et déclaration des émissions, garantie de restitution des certificats MACF à la fin de la période annuelle).

 

Les importateurs agréés devront déclarer chaque année le volume des produits concernés par le dispositif mis en libre pratique sur le territoire douanier de l’UE (ou placés sous le régime de perfectionnement actif pour servir de matières premières à la fabrication des produits dérivés qui seront par la suite mis en libre pratique dans l’UE). Ils devront également calculer et déclarer les émissions de gaz à effet de serre générées par le processus de fabrication de ces produits (et, plus tard, aussi de leur transport jusqu’à l’UE). Les importateurs agréés restitueront ensuite, avant le 31 mai de l’année N+1, le nombre de certificats MACF nécessaires pour compenser ces émissions (certificat à acheter au préalable auprès de l’Autorité MACF, à constituer).

 

Les déclarations faites par les importateurs agréés seront certifiées par des vérificateurs accrédités. Les installations de fabrication étrangères jugées fiables pourront bénéficier du statut d’installations enregistrées, les dispensant d’une partie des vérifications.

 

Le prix des certificats sera, dans un premier temps, calculé en fonction du prix moyen hebdomadaire de vente aux enchères des quotas du SEQE UE, exprimé en EUR/tonne de CO² émis. Le mécanisme de calcul du prix des certificats évoluera par la suite ensemble avec l’évolution du SEQE UE, l’attribution des quotas gratuits ayant vocation à disparaitre.

 

Les ressources financières générées par le MACF auront le statut de ressources propres de l’UE, mais serviront également à financer la participation de l’UE à l’effort de décarbonation fait par les pays en voie de développement.

 

Le contrôle de l’application du MACF sera confié aux autorités douanières des Etats membres, qui agiront de concert avec l’Autorité MACF.

 

 

Calendrier d’entrée en vigueur du MACF :

 

Le MACF entrera en vigueur de manière progressive. Les importateurs agréés devront déclarer la quantité des émissions générées par les produits importés dès le 1er octobre 2023. Ils ne devront les compenser par des certificats MACF à acheter qu’à partir de 2026 ou 2027.

TAXE SUR LES EMBALLAGES PLASTIQUES

TAXE SUR LES EMBALLAGES PLASTIQUES

La « Plastic tax » (ou « Taxe plastique »), comme il est devenu commun de l’appeler, est entrée en vigueur le 1 janvier 2020.

Il ne s’agit pas d’une taxe à proprement parler mais d’une contribution que chaque État Membre reverse à l’Union européenne sur les tonnages de déchets d’emballage en plastique non-recyclés, mesurés sur la base des données statistiques sur les quantités d’emballages mises sur le marché, collectées et triées chaque année par catégories, transmises par les États en application du Règlement CE 2150/2002.

 

Tandis que certains États ont pris la décision de payer cette contribution au moyen de leurs budgets nationaux (tel est le cas notamment de la France, de la Belgique, du Luxembourg, des Pays-Bas), d’autres en ont répercuté la charge, en tout ou partie, sur les metteurs sur le marché des emballages (tel est le cas notamment de l’Espagne et de l’Italie qui appliqueront à compter du 1 janvier 2023 une taxe de 0,45 €/kg sur les emballages plastiques non-recyclables).

 

La France maintien, à date, l’absence de répercussion de la « plastic tax » sur les metteurs sur le marché des emballages et entend les pousser autrement à atteindre ses objectifs de recyclage. Parmi ces mesures figurent notamment :

 

Why exporting our waste is vital?

Why exporting our waste is vital?

The great majority of everyday consumption goods are not produced in the EU but imported. The residues of these goods – turned into waste – can be recycled back into the industrial cycles from which they came, in the form of the secondary raw materials. However, under pressure from environmental NGOs, the EU is questioning the need to ban the export of recyclable waste.

 

Should the EU succumb to this pressure and thus break the global circular economy loop? Certainly not.

 

Isolating the market for recyclable waste at EU level will lead to a chain of negative consequences the impact of which has not been assessed at all.

 

Negative consequences for the European recycling industry:

The European recycling business model is not prepared at all for such a change. If recyclable waste can no longer be sent to industrialised countries abroad that consume it as a secondary raw material, this recyclable waste will end up on the European secondary raw materials market, which will collapse due to the overabundance.

The sudden drop in the price of secondary raw materials will put a strain on the budgets of Europe’s municipalities and waste treatment operators, who will not be able to cope.

This situation will definitely delight some European manufacturers who consume recyclable materials, and who are pushing for this change, knowing that it will offer them an abundance of totally free raw materials. But their joy may not be long-lasting. There is no doubt that the foreign countries to which these manufacturers export their products will ultimately understand that those are receiving a disguised subsidy and will react by imposing anti-dumping duties on them.

 

Negative environmental consequences:

Second, the ban on the export of European waste will also create a shortage of recyclable resources abroad and force the foreign manufacturers concerned to turn to primary resources. Such a change in sourcing will necessarily increase the carbon footprint of the goods produced by these manufacturers, whereas until recently they were participating in the virtuous cycle of recycling.

 

 

Seeking to satisfy public opinion without a thorough analysis of the situation is not an acceptable solution. Thinking about the consequences before acting is more necessary than ever.

 

Related articles:

Facilitating or banning international trade in recyclable waste? by Evguenia DEREVIANKINE, International Trade, ICC France, 04/03/2022, page 13.

Waste Shipment Regulation set to decimate European recycling industry, by EuRIC.

Conséquences financières de la représentation indirecte

Conséquences financières de la représentation indirecte

Le représentant en douane (RDE) peut accomplir les formalités douanières en mode de représentation directe ou indirecte. Quel que soit le mode de représentation retenu, le contrat de représentation demeure un contrat de mandat et impose aux parties les obligations propres à ce type de contrat. Le choix du mode de représentation retrouve, en revanche, toute son importance lorsque l’importateur a disparu (ou est devenu insolvable) et a laissé le représentant en douane seul face à l’Administration. Si le représentant est intervenu en mode de représentation indirecte, l’Administration peut, en effet, venir lui réclamer le paiement de l’intégralité de la dette…. sauf peut-être pour ce qui concerne la TVA, car, rappelle la CJUE, la solidarité en matière de TVA n’est pas prévue par les réglementations nationales de tous les Etats.

 

En représentation directe, le représentant en douane agit au nom et pour le compte de son mandant qui est considéré comme le « déclarant » et donc comme débiteur des droits de douane ainsi que de la TVA. En représentation indirecte, le représentant en douane agit pour le compte de son mandant mais en son nom propre, ce qui le rend solidaire du paiement des droits de douane dus par son mandant et, en principe, de la TVA… Mais si la solidarité entre le représentant en douane agissant en représentation indirecte et son mandant est expressément prévue par le texte pour la dette douanière, tel n’est pas le cas pour la TVA. La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a donc dû se prononcer sur la question de savoir si le représentant en douane agissant en représentation indirecte pouvait valablement se voir réclamer le paiement de la TVA en plus des droits de douane (CJUE, 12 mai 2022, C-714/20).

La question aurait pu paraitre absurde tant le lien entre la TVA à l’importation et les droits de douane peut être étroit. La TVA à l’importation est, en effet, liquidée sur la base des informations saisies sur la déclaration douanière et est, fréquemment, recouverte « comme en matière de douane ».

Cette question n’est pas pour autant anodine. Dans le cas d’espèce l’importateur, bien que débiteur ultime de la dette de TVA, faisait l’objet d’une procédure collective. Ainsi, le représentant en douane risquait de devoir payer 959 607,46 euros de TVA avec intérêts de retard, sans la moindre possibilité de recouvrement de celle-ci sur l’importateur, en procédure collective, ni droit à la déductibilité de la TVA (CJUE, 8 octobre 2020, C-621/19).

 

La TVA fait-elle partie de la « dette douanière » ?

 

Pour répondre à la question qui lui a été posée, la Cour a d’abord dû s’interroger sur la question de savoir si la TVA faisait partie de la « dette douanière », définie comme l’obligation d’acquitter le montant des « droits à l’importation ou à l’exportation » (article 5 point 18 du CDU). Elle y a répondu par la négative en rappelant sa jurisprudence de 2010 (CJUE, 29 juillet 2010, C-248/09) dans laquelle elle avait jugé que la TVA ne faisait pas partie des « droits à l’importation » qui étaient, à l’époque, définis comme « les droits de douane et les taxes d’effet équivalent prévus à l’importation des marchandises » (ancien article 4 point 10 de l’ancien code des douanes communautaire). Depuis, la notion des « droits à l’importation » a été affinée et ne reprend plus que « les droits de douane exigibles à l’importation des marchandises » (article 5 point 20 du CDU). Or, si la TVA ne fait pas partie de la « dette douanière », elle ne peut pas être soumise aux règles régissant cette dernière et suit, nécessairement, un régime propre.

 

La solidarité du représentant en douane agissant en représentation indirecte, telle que prévue par le CDU, est-elle reprise par les textes applicables à la TVA ?

 

La solidarité du représentant en douane agissant en représentation indirecte avec l’importateur pour ce qui concerne les droits de douane est expressément prévue par le CDU. Le représentant en douane agissant en représentation indirecte est qualifié de « déclarant » au sens de l’article 5 point 15 du CDU, Or, l’article 77§3 du même code dispose que le « déclarant » doit être considéré comme « débiteur » de la dette, au même titre que son mandant (§40 à 42 de l’arrêt), les deux devenant « conjointement et solidairement » responsables de son paiement (article 84 du CDU ; §46 de l’arrêt). Mais cette solidarité ne concerne que la « dette douanière » dont la TVA ne fait pas partie. La CJUE a donc conclu que le représentant en douane agissant en représentation indirecte n’est pas retenu comme débiteur de la dette de TVA « en vertu du seul article 77 » du CDU.

C’est donc vers la directive 2006/112/CE sur la TVA que s’est tournée la Cour pour rechercher une éventuelle solidarité du représentant en douane agissant en représentation indirecte avec l’importateur. Or, l’article 201 de la directive ne fait pas de renvoi aux régime applicable de la dette douanière pour ce qui concerne la détermination du débiteur de la TVA (§50 de l’arrêt). Ceci exclut définitivement l’hypothèse suivant laquelle la TVA puisse suivre le même régime juridique que celui applicable à la « dette douanière » visée à l’article 5 point 18 du CDU. L’article 201 de la directive TVA prévoit simplement que l’obligation de payer la TVA incombe « à la personne ou aux personnes désignées ou reconnues par l’Etat membre d’importation » (§55 de l’arrêt). Cette disposition laisse donc aux Etats membres le pouvoir de désigner une ou plusieurs personnes redevables de la TVA (§56 et §57). En conséquence la Cour a répondu qu’il n’y a pas de solidarité automatique entre le représentant en douane agissant en représentation indirecte et l’importateur en ce qui concerne la TVA, à moins que les Etats membres en aient décidé autrement dans leurs législations nationales transposant la directive.

La CJUE a conclu qu’en absence de règles de transposition « désignant » ou « reconnaissant » de manière « explicite et non équivoque » le représentant en douane agissant en représentation indirecte comme étant responsable du paiement de la TVA solidairement avec l’importateur, il ne peut pas être considéré comme étant redevable du paiement de cette taxe (§65 de l’arrêt).

En France, l’article 293 A du code général des impôts dispose que le représentant en douane est conjointement et solidairement responsable du paiement de la TVA dès lors qu’il est en représentation indirecte. Mais il n’existe pas de texte équivalent dans d’autres Etats membres, dont la Lituanie, par exemple.

 

Quelle conclusion tirer de cet arrêt ?

 

L’arrêt de la CJUE n’a pas de conséquences directes en France où le régime de solidarité en matière de TVA est aligné sur le régime de solidarité en matière de droits de douane.

Les faits jugés rappellent, en revanche, la dangerosité de ce mode de représentation pour le représentant en douane et la nécessité, pour lui, de faire de la pédagogie auprès de ses clients chargeurs qui exigent la représentation indirecte en pensant – à tort – qu’elle rendra leur cocontractant plus vigilant.

Mais contrairement à ce que s’imaginent certains chargeurs, la représentation indirecte ne se distingue pas de la représentation directe. En tout état de cause, pas pour ce qui concerne les relations entre le représentant en douane et le chargeur:

  • mandataire, le commissionnaire, même agissant en représentation indirecte, demeure tributaire des instructions fournies par son client relatives à la marchandises qui en reste seul responsable et garant (question propres à la nature de la marchandises et à la réglementation qui lui est applicable);
  • professionnel de la douane, le commissionnaire en douane agissant en représentation directe, tout comme le commissionnaire agissant en représentation indirecte, répond de la totalité de ses actes et manquements, y compris pénalement, et doit à son client une obligation de conseil sur les questions dont il est le maître (transcription douanière des instructions fournies par le client).

La représentation indirecte conduit, en revanche, le représentant en douane à fournir à l’Administration douanière une garantie de solvabilité du chargeur représenté, telle une assurance-risque d’insolvabilité. Le représentant en douane ne doit alors accepter ce mode de représentation qu’après avoir lui-même souscrit une assurance spéciale à ce titre et en avoir répercuté les frais au chargeur représenté.

 

Par Evguenia DEREVIANKINE et Anouck BIERNAUX

Droits de douane sur les transmissions électroniques

Droits de douane sur les transmissions électroniques

Prorogation du moratoire relatif aux droits de douane sur les transmissions électroniques.

A l’issue de la douzième Conférence ministérielle de l’OMC (CM12), qui s’est tenue du 12 au 15 juin 2022, a été prise la décision de maintenir la pratique consistant à ne pas appliquer les droits de douane aux transmissions électroniques, et ce, au moins « jusqu’à la CM13, qui devrait normalement avoir lieu d’ici au 31 décembre 2023 » (décision ministérielle du 17 juin 2022 – Programme de travail sur le commerce électronique).

L’interdiction d’appliquer les droits de douane aux transmissions électroniques a été adoptée par les Etats membres de l’OMC en 1998 sous forme d’un moratoire dont la prorogation revient en discussion tous les deux ans.

Cette année, le retour de la Conférence était particulièrement attendu, dans la mesure où de nombreux pays, dont l’Inde et l’Afrique du Sud, réclament l’abandon du moratoire.

Le mécontentement de l’Inde et de l’Afrique du Sud par le moratoire est motivé par la croissance de la numérisation de nombreux biens (jeux vidéo, films, musique, livres, etc.) et la disparition progressive des recettes douanières que générait autrefois le commerce de leurs supports matériels (DVD, CD, etc.) (voir la communication de l’Afrique du Sud et de l’Inde à l’OMC).

Ce mécontentement semble être « légitimé » par le constat de la Conférence des Nations-Unies sur le Commerce et le Développement (CNUCED) suivant lequel le moratoire a engendré en 2017 une perte de recettes douanières d’environ 1 506 millions de dollars pour les pays membres de l’OMC les moins avancés (WTO LDC (for Least-Developed Countries) members) contre 289 millions de dollars de perte pour les pays membres de l’OMC à revenu élevé (WTO High-Income). Aussi, selon les prévisions de la CNUCED, la tendance observée à la numérisation des échanges ne fera qu’augmenter dans le futur avec notamment la « démocratisation » de l’impression 3D, l’analyse du Big Data, la robotique, l’intelligence artificielle, etc. (growing trade in electronic transmissions : implication for the south – CNUCED).

Force est cependant de rappeler que la perte des recettes douanières est généralement compensée par la croissance des redevances perçues sur les échanges électroniques vus sous le prisme de « services ».

Il convient néanmoins de suivre d’un œil attentif les échanges qui naitront de l’engagement pris le 17 juin dernier par la Conférence ministérielle de « redynamiser les travaux dans le cadre du Programme de travail sur le commerce électronique ».

 

Par Anouck BIERNAUX, avocat, PARADIGMES